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Studio étudiant

Jacob - 5 juin 2043

La clé tourne dans la serrure. J’ouvre doucement la porte. Ça fait du bien de rentrer chez soi. La journée à été longue. Les cours ont été intenses mais bon, quand on fait ce qui nous plait, on ne voit pas le temps passé. L’avantage c’est que le centre académique n’est pas très loin de ma résidence et comme il est entouré de verdure, cela fait une belle coupure avant de revenir au monde “réel”.

L’appartement n’est pas très grand, il fait une trentaine de mètres carrés mais plus que la taille c’est l’agencement qui compte. Tout est pensé pour maximiser l’espace et la capacité de rangement. Face à l’entrée, une grande baie vitrée permet d’illuminer la pièce naturellement. Je pose mes affaires sur le bureau intégré dans la mur de rangement qui traverse l’appartement de part en part. J’ouvre la porte opposée vers la salle de douche pour me laver les mains. Elle ressemble à un énorme cube posé dans un coin de la pièce. On y trouve un lavabo, les WC et une douche à l’italienne qui prend la majorité de l’espace. Grâce à une belle hauteur sous plafond, mon lit est disposé sur le cube qui renferme la salle de douche. D’un simple geste je peux déplier l’escalier intégré dans sa paroi et grimper à l’étage. L’espace n’est pas très grand mais peut tout de même contenir un lit double et quelques rangements disposés tout autour de ce dernier. Plutôt que de fixer les choses sur les murs, on profite de la hauteur du matelas pour y ranger le nécessaire.

L’espace peut se fermer par des panneaux légèrement opaques formant alors un cocon bienveillant. L’été je les ouvre en grand pour faire rentrer la fraîcheur de la nuit à l’intérieur. Des ouvertures au-dessus de la baie vitrée permettent de créer un mouvement d’air dans la pièce pour la ventiler et éviter que la chaleur s’accumule au plafond. Pratique pour ne pas mourir de chaud au plus haut de la saison.

Comme tous les jours, je vais faire le tour de mes plantations sur le balcon qui prolonge la baie vitrée. Les balcons sont relativement spacieux, prolongeant bien l’espace intérieur. J’ouvre en grand la baie vitrée. Une pergola tout en bois surplombe le balcon et s’avance suffisamment pour offrir, une fois recouvert des plantes grimpantes qui poussent à ses pieds, une sorte de climatisation naturelle. Elle limite alors l’entrée des rayons du soleil dans l’appartement. En hiver au contraire, quand la végétation n’est plus présente, elle laisse passer suffisamment de lumière pour éclairer une bonne partie de la pièce sans avoir besoin de rajouter de lampes d'appoint.

Comme beaucoup d’étudiants, je fais pousser quelques fruits, légumes et aromatiques. Ce n’est bien sûr pas suffisant pour être autonome mais c’est un accès rapide à quelques douceurs. J’attrape mon arrosoir et le remplit pour humidifier les bacs pleins de verdure. Les balcons sont pensés pour gérer des charges lourdes et pour la récupération d’eau. J’arrache les feuilles qui ne sont pas très jolies et je les jette dans le lombricomposteur. Je ramasse quelques tomates cerises mûres à point et quelques feuilles de laitue. Sur le auvent, des petites courges commencent à prendre forme. Des abeilles butinent les fleurs. Cela donne vraiment un cadre bucolique vraiment agréable.

Je me dirige vers la cuisine et je sors un saladier dans lequel je pose ma petite récolte. Je jette un œil dans le frigo pour voir comment compléter ce qui me fera office de dîner. Comme dans beaucoup de nouvelles constructions, le frigo est amovible de sorte que l’hiver, on puisse le pousser dans le mur jusque sur le balcon pour profiter du froid ambiant naturel. Mine de rien, cela fait faire de sacrées économies d’énergie. Quand la chaleur de saison revient, il n’y a plus qu’à le tirer vers l’intérieur et rallumer le courant. Cette technique, venue des low-techs est maintenant un standard dès que c’est possible.

Je referme la porte du frigo, l’air déçu. Je mettrais bien un peu de mozzarella dedans mais je n’en ai plus. Je me rue vers la porte et quitte l’appartement. Je dévale l’escalier jusqu’à l’espace commun au rez-de-chaussé. Je passe devant la salle de sport, la buanderie commune et la médiathèque, avant de rentrer dans la petite boutique alimentaire près de l’entrée. Avoir toutes ces commodités directement en bas de chaque bâtiment est un plaisir. On peut y louer des films, aller lire un bouquin le temps que sa lessive tourne ou tout simplement faire une petite séance de yoga au petit matin et tout ça, sans avoir à courir partout en ville. En plus la grande majorité des produits qui sont sur les étals de la boutique viennent directement des potagers qui bordent la résidence. Comme partout, chacun participe à l’entretien de tout ça, lors de la journée communautaire hebdomadaire. A tour de rôle, nous faisons notre part pour le nettoyage des communs, l’entretien ou les récoltes au potager ou la gestion des déchets et du composteur-méthaniseur. Toutes les cuisinières et les potagers de la résidence sont en grande partie alimentés par ce dernier.

Je remonte avec ma mozzarella que j’incorpore au reste de ma salade. J’assaisonne avec un peu d’huile de noix et de vinaigre maison que font mes parents. J’extraie la table du mur de rangement et la tire jusqu’au canapé. Je me régale de cette petite salade toute simple en savourant le silence qui règne. Nous sommes des centaines dans la résidence et en dehors des bruits de la rue, rien ne trouble le calme de mon appartement.

Il faut dire que pour des raisons d’isolation, les murs et les sols sont très épais. Le confort sonore et l’efficacité énergétique étant devenus des règles de base de toutes constructions et rénovations. Un autre avantage, c’est que des portions du plancher sont maintenant escamotables pour laisser apparaître des gaines techniques pour la plomberie et l'électricité. Et c’est vraiment pratique. Mes parents qui vivent dans une maison qui n’a pas été complètement rénovée ont eu une fuite quelques années et comme la majorité de la plomberie est dans les murs cela a été une vraie galère pour eux. Quand un tuyau a pété chez un voisin, il y a quelques mois, en une heure c’était réglé. Il a suffit au plombier de retirer la section de plancher sous laquelle se trouvait le tuyau coupable et il a pu remplacer la section sans avoir besoin de casser un mur ou de déménager tout l’appartement.

Une fois mon repas terminé, je range la table et pose le saladier dans l’évier. Je retourne le canapé vers le balcon, la baie vitrée grande ouverte, on se croirait presque dehors.